Monday, April 30, 2012

Conseils pour se faire respecter



Comment se faire respecter dans la société, en famille, au sein du couple ? Voici les conseils du psychiatre et psychanalyste Stéphane Clerget, auteur avec Bernadette Costa-Prades, de Osez vous faire respecter.
Christilla Pellé Douel
A lire
Osez vous faire respecter ! de Stéphane Clerget et Bernadette Costa-Prades (Albin Michel 2010) Se respecter n’est pas seulement une question de confiance en soi, c’est la condition qui permet de vivre ensemble dans une société civilisée. C’est à ce décodage et à la reconquête de sa respectabilité, au vrai sens du terme, que nous conduisent le psychiatre et psychanalyste Stéphane Clerget et notre collaboratrice Bernadette Costa-Prades. Ils concluent ce bénéfique petit livre par cette phrase : « Là où le mépris dresse un mur, le respect ouvre le dialogue et permet de n’être ni victime ni bourreau. Un beau programme. »

Désamorcer un conflit dans un lieu public

« Il m’arrive parfois de me faire dépasser ou bousculer dans les files d’attente. Dans ces cas-là, j’ai vraiment la sensation d’être méprisée. Je n’arrive jamais à dire quoi que ce soit, ce qui me rend furieuse… contre moi-même. » Angèle, 27 ans
Le décryptage
« Nous rencontrons tous ces petits manques de respect du quotidien, irritants et désagréables. Comme le dit Angèle, ce sont des mini-négations de notre identité. L’espace d’un instant, nous n’existons plus en tant qu’individu. Nous sommes “chosifiés”. Selon notre état d’esprit du moment, nous pouvons le vivre plus ou moins bien, mais cela peut gâcher la journée. »
Comment s’affirmer ?
« Ne pas se rendre invisible. Les marques d’irrespect s’adressent plus facilement à ceux qui se font trop discrets. Personne n’oserait bousculer David Douillet, par exemple ! Il y a donc une attitude corporelle à prendre : redresser les épaules, habiter son corps. Et puis, si l’on ne se trouve pas face à une bande de jeunes agressifs, faire savoir que l’on n’a pas apprécié. Une technique consiste à chercher des liens, des appuis parmi les personnes présentes. Dire tout haut, en accrochant le regard d’une personne : “Elle est pressée, cette dame !” et, si possible, utiliser l’humour. Mais une des meilleures façons de réagir, c’est vraiment de créer une complicité, un cordon de personnes autour de soi. C’est le lien social qui protège de l’irrespect. Si on avait moins peur de réagir pour les autres aux petites agressions de ce genre, de soutenir les agressés, cela irait sûrement mieux. Autrefois, un enfant mal élevé se faisait reprendre par les personnes présentes. »

Se faire respecter par ses propres parents

« Ma fille de 6 ans a passé les dernières vacances chez ma mère. Quand elle est rentrée, j’ai été choquée de voir qu’elle avait les cheveux coupés. Ma mère ne m’avait pas demandé mon avis. Je ne l’ai pas supporté et je me suis violemment disputée avec elle. Je ne parviens pas à digérer ce que je vis comme une insupportable prise de pouvoir et comme un manque de respect de ma place de mère. » 
Hélène, 35 ans
Le décryptage
« Hélène a raison. Il s’agit même d’un double manque de respect : à la fois envers la mère et l’enfant. N’oublions pas que seuls les parents ont l’autorité parentale sur leur enfant. Pas les grands-parents. La grand-mère a éclipsé la mère, se plaçant dans une position toute-puissante. Notons qu’il s’agit de couper les cheveux. Or, les toucher, les couper, c’est prendre la tête, prendre le pouvoir. On “décapite” le roi. La grand-mère a symboliquement “décapité” sa propre fille en coupant les cheveux de sa petite-fille, signe de la féminité, de la séduction. Cette femme refuse le passage des générations, de reconnaître deux féminités, celle de fille et celle de petite-fille. »
Comment s’affirmer ?
« Hélène devrait demander au père de l’enfant d’intervenir. En introduisant un tiers masculin, elle remettrait de l’ordre dans la relation mère-fille petite- fille. Par ailleurs, si le dialogue est impossible, pourquoi ne pas écrire une lettre ? Cela permettrait une mise à distance. Hélène pourrait y dire solennellement ce qu’elle ressent, avec un rappel à la loi qui serait bienvenu : “Je suis la mère, que tu le veuilles ou non.” Enfin, qu’elle demande à sa mère une reconnaissance de la gravité de ce qui s’est passé, ainsi que des excuses. Cette crise autorisera sans doute Hélène à se détacher de sa relation trop forte, semble-t-il, avec sa propre mère. »

Refuser d’être dévalorisé par son partenaire

« Lorsque nous sommes avec d’autres personnes, mon compagnon fait souvent de l’humour à mes dépens : il souligne ma maladresse, rit avec les autres de mes bévues. Au début, ça m’amusait, mais j’ai maintenant le sentiment qu’il cherche à me dévaloriser. Lorsque je lui en parle, il répond immanquablement : “C’était une plaisanterie. Tu perds ton sens de l’humour.” »
Laure, 37 ans
Décryptage
« C’est une situation très courante. L’humour peut être une arme utilisée pour régler des comptes, et c’est une agressivité qui avance masquée lorsqu’elle s’adresse à une personne en public. Ici, l’humour s’exerce au sein du couple, aux dépens de la femme. Son apparition systématique, et en public, signale un vrai manque de respect et une rupture de la solidarité du couple. On y repère une trace de sadisme : je te fais mal, je me cache et tu ne peux rien dire. »
Comment s’affirmer
« La jeune femme doit demander clairement à son compagnon d’arrêter, lui signaler que ce n’est pas supportable, justement en raison du caractère répétitif des plaisanteries. Et indiquer clairement que si cette demande n’est pas entendue, elle ne participera plus à ces réunions : en effet, sa présence peut être interprétée comme une approbation implicite de la situation. Et cela ne pourra qu’empirer. Il faut provoquer un choc, une rupture. Pourquoi ne pas le mettre face à lui-même ? Par exemple, lui demander calmement s’il a connu une situation identique lorsqu’il était enfant; ou bien en profiter pour débusquer l’éventuelle frustration ou le ressentiment qui se cacherait derrière ses plaisanteries. »
Septembre 2010
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